Echotopias
Cette année, on fête les 50 ans de “Ecotopia ↱“, un livre écrit par Ernest Callenbach ↱ et publié en 1975.
Il y a tout dedans : la transition énergétique du début du 21ème siècle, les progrès en matière de social et d’écologie (tri des déchêts, recyclage, matériaux biosourcés, transports collectifs, etc etc). On a parcouru une partie du chemin depuis lors, mais il va plus loin.
Dans la réédition de 2018 de la Librairie Eyrolles ↱, Brice Matthieussent, pendant le 1er mandat de Trump, souligne son actualité et appelle à ce que ses messages soient entendus. Quelques extraits ci-dessous.

“Tout commence quand la Californie, l’Oregon et l’État de Washington décident de faire sécession pour créer un écosystème fondé sur la décroissance – économique, démographique, consumériste – et sur un équilibre stable entre les êtres humains et leur environnement.
En Écotopia, le recyclage est obligatoire, les transports sont gratuits, il n’y a plus de voitures individuelles, remplacées par des minibus électriques dans les grandes villes du pays où abondent arbres, rivières et jardins ; les énergies solaire, géothermique et marémotrice suppriment la dépendance envers le pétrole ; la pollution a quasiment disparu, d’autant que les avions de ligne sont interdits dans l’espace aérien.
(…)
Pensons aussi aux récentes prises de position de Donald Trump annonçant la réouverture des centrales à charbon et son refus d’appliquer les accords de Paris sur le climat. La Californie s’est alors insurgée violemment contre ces décisions calamiteuses, purement démagogiques ; certains responsables de la côte ouest ont même envisagé de faire sécession, comme si le livre de Callenbach avait anticipé et validé par avance ce rêve d’un État entièrement écologique.
(…)
Après les désastres qu’ont été les régimes totalitaires du XXe siècle et malgré l’aveuglement suicidaire des États d’aujourd’hui, Callenbach ose affirmer qu’une autre société est possible : responsable, pacifique, soucieuse de l’environnement et du long terme, réellement démocratique, privilégiant l’épanouissement personnel et le do it yourself à la consommation effrénée et, bouleversement encore plus incroyable, abrogeant l’éthique protestante du travail au profit des loisirs et de la pratique des arts !
(…)
Contrairement à Callenbach, Thoreau n’a jamais envisagé l’existence d’une société entière fondée sur ces idéaux, seulement leur expérience individuelle. Ici, dans ce livre, c’est le combat commun qui l’emporte sur l’individualisme, non pas dans sa version totalitaire, bien plutôt au service de la singularité de chacun – all the women and men.
(…)
Ce roman est un manifeste en même temps qu’un cri d’alarme : si nous ne changeons pas nos habitudes de vie, la planète elle-même nous imposera des bouleversements catastrophiques. Si nous ne voulons pas que les fictions dystopiques ou post-apocalyptiques deviennent réalité, nous devons faire en sorte que les leçons d’Écotopia soient entendues.“



Le coût des externalités négatives (aujourd’hui on dit : les conséquences du dérèglement climatique atteindront X% du PIB en 2050).
“Assumer tous les coûts” c’est aussi ce que disait à la même époque Ivan Illich dans “la convivialité”…

“Ma chambre est équipée de trois vide-ordures de recyclage et, comme un bon Écotopien, j’ai jeté ces brochures dans celui marqué « P ». Par bonheur, les citoyens de ce pays ne mâchent pas de chewing-gum, car dans quel vide-ordures faudrait-il le mettre ?“
Pas d’emballage plastique ==> pas besoin de poubelle plastique

“J’ai vu Allwen à la télévision à l’occasion d’un événement officiel, l’inauguration d’une centrale d’énergie solaire.
Rien à voir avec nos cérémonies où l’on coupe symboliquement un ruban. Ici, les gens qui participent sont ceux qui ont fait le travail. Des cameramen déambulent dans la foule ; tout est très informel, il n’y a apparemment pas de spectateurs passifs, tout le monde parle avec tout le monde. Divers groupes apparaissent à l’image ; l’un d’eux inclut une femme assez ordinaire mais solide, qui bavarde et rit avec les ouvriers. Quand ils lui montrent des documents, elle blague aussitôt avec eux. Je comprends enfin que c’est Vera. Personne ne lui demande de prononcer un discours. Elle se tourne alors vers une femme pour lui dire : « Pourquoi ne pas raconter à tout le monde comment les choses ont démarré ?
Avec sérieux mais sans la moindre emphase, cette femme retrace l’historique de l’usine : pourquoi on en avait besoin, comment les membres des communautés qui allaient en bénéficier ont décidé quel type d’usine ce serait, comment certaines découvertes scientifiques récentes y ont été intégrées. Elle se tourne ensuite vers ses voisins, qui décrivent la construction du bâtiment – une majorité d’anecdotes hilarantes, rien à voir avec nos laïus solennels exaltant une contribution majeure au progrès de l’humanité. Des aspects de cette usine sont de toute évidence loin d’être parfaits, du moins selon plusieurs détracteurs, et leurs critiques n’ont absolument pas été censurées. Dès que l’atmosphère s’alourdit, Allwen intervient dans la conversation. Sans jouer à l’arbitre ni à la mère bienveillante, elle évoque un autre cas litigieux avant d’expliquer comment les gens ont finalement uni leurs forces pour résoudre le problème. L’ambiance se détend alors : la confiance et l’esprit de solidarité ont été restaurés.”
#communisme

“Autrement dit, le chaos financier ne devait pas être supporté, mais délibérément organisé. Dès que les capitaux fuiraient le pays, la plupart des usines, des fermes et des autres moyens de production tomberaient entre les mains des Écotopiens comme des fruits bien mûrs.“




Réponse dans le livre…mais cela se conjugue avec d’autres circonstances, en particulier la tendance démographique.
N’est-ce pas un BIG ARGUMENT qui pourrait réunir la gauche et la droite? Trajectoire durable + augmentation des ressources par habitant…ça donne au moins un horizon “positif”, un rêve commun à poursuivre…
En Ecotopia, le déclin de la population était un objectif, et des politiques ont été mises en place pour y parvenir. En Belgique, c’est déjà le cas : pas besoin de politique particulière, la popualtion est déjà en déclin ↱![]()
(Néanmoins, sur ce site, la démographie n’est pas considérée comme une variable d’ajustement, ou pertinente. “On fait avec”, simplement, pas de malthusianisme, cfr triangle de Kaya).
Le déclin de la population était un objectif, car cela plusieurs avantages:
“La population écotopienne diminue lentement, et ce depuis presque quinze ans.
Ce fait stupéfiant – qui suffirait à différencier l’Écotopia des États-Unis et de toutes les autres nations du monde, sauf le Japon – a provoqué une kyrielle de rumeurs suggérant qu’on pratique sans doute ici de nombreux avortements, voire l’infanticide. J’ai mené une enquête assez approfondie pour être néanmoins en mesure d’affirmer que ce déclin démographique résulte uniquement de décisions irréprochables. Nous oublions volontiers que, même avant l’Indépendance, le taux de croissance démographique dans la future Écotopia avait ralenti, comme dans presque tous les États-Unis. Les démographes américains expliquaient cette baisse régulière par une inflation et une récession durables, des lois plus souples encadrant l’avortement, et surtout la prise de conscience accrue que, dans une société industrielle avancée, l’arrivée de nouveaux enfants était davantage un fardeau qu’un atout pour une famille – à l’inverse de l’opinion courante dans les sociétés agricoles ou moins évoluées.
(…)
Après la Sécession, les Écotopiens firent de la baisse démographique un objectif national, mais non sans de longues et amères discussions préalables. Tous étaient d’accord pour adopter une forme ou une autre de déclin, afin de diminuer la pression sur les ressources naturelles et les espèces vivantes et pour améliorer le confort des citoyens du nouvel État. Mais les opinions divergeaient sur l’ampleur de ce déclin volontaire et les moyens d’y parvenir. La peur terrible liée à l’extinction pure et simple de la population fournit des arguments de poids aux adversaires de ces mesures, et les économistes mirent en garde contre la diminution des ressources fiscales.
(…)
Certains extrémistes prétendent que ce déclin fournit un substantiel surplus annuel de ressources par habitant et explique en partie la vitalité économique du pays. Même si ce déclin a un effet indubitable sur l’atmosphère de confiance qui règne dans les sphères politiques et économiques, je ne suis guère convaincu de ses influences directes, car après tout il se limite à trois pour cent par an.“

Utopie?


Universités:

Hôpitaux:

Economie:

Attention spoiler : dernier paragraphe:

Epilogue:

Chez moi, c’est un pays pacifiste, écologiste, communiste, radieux sous tous les aspects.
#Lalittérature
“J’ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :
– Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t’exiles,
Million d’oiseaux d’or, ô future Vigueur ?”
✴ Revenir au noeud γ
Et pourquoi pas… Une adaptation d’Ecotopia en film d’animation, par épisodes/chapitres, créée à partir de générateurs IA de vidéos à partir d’images, images elles-mêmes créées à partir de générateurs d’IA d’images, avec des prompts inspirés d’extraits du livre…Ce serait un investissement en carbone pour un retour sur investissement en dé-carbone. Mais en être fidèle? L’histoire “telle quelle”? Ou l’adapter par exemple…à la Belgique? Cela aurait des implications profondes sur le scénario, même sur les aspects de la société ecotopienne, car les particularités régionales de la biosphère wallonne sont différentes de celles de la côte Ouest des États-Unis…
“Et pourquoi pas…Une île relativement inconnue, c’est une île encore complètement préservée, avec une vraie culture locale, des lagons, de la pêche, ils sont réputés pour avoir les plus beaux fruits du monde…” (François Damiens ↱)

Les 3 fondements des “marxismes écologiques”:
1) se concentrent sur le rôle du mode de production capitaliste dans la trajectoire écocidaire des sociétés modernes
“Les marxismes écologiques affirment d’abord que le capitalisme est le principal responsable de la crise écologique, un constat qui n’est pas unanimement partagé en écologie politique” (n’est-ce pas Ecolo?)
“A la différence des pensées de la décroissance, par exemple, les marxismes écologiques défendent que les tendances au développement infini de l’économie et au dépassement des limites planétaires ne sont pas d’abord liées à une croissance de la demande de consommation, mais à un système de production fondé sur l’accumulation de capital (…) comme l’ont fort bien montré l’économiste décroissant Timothée Parrique ou le philosophe écomarxiste Kohei Saito.“
2) se réclament d’un rapport étroit -qu’il soit critique ou apologétique- à la pensée de Marx
(apologétique : qui a un caractère d’apologie)
3) développent des analyses de longue durée et à l’échelle mondiale, impliquant une critique de l’impérialisme écologique.
3 mots d’ordre d’ordre stratégique de l’écomarxisme :
1) La plannification écosocialiste
2) la lutte des classes climatique (union des luttes, voire caractère central de la classe ouvrière, qui détient les clés de la production)
3) l’activisme écologique (blocages, occupation, sabotage afin d’obtenir l’abandon de projets écocidaires ou des réformes favorables aux politique d’atténuation du réchauffement climatique)
Il faut distinguer l’écosocialisme productiviste (la poursuite du productivisme et de la croissance hors du capitalisme, sans considération pour l’écologie), c’est la ligne “Engels”, climatodénialiste de type III , ou la “ligne PTB”, et l’écomarxisme ou marxisme écologique, c’est la ligne “Marx”, qui promeut finalement l’état stationnaire et la soutenabilité, c’est-à-dire une ligne qu’on pourrait dire anti-productiviste. Comme l’explique Kohei Saito dans l’extrait repris dans le livre (voir ci-dessous), ou bien Timothée Haug:
“L’une des controverses qui structure le champ du marxisme écologique (…) porte sur l’écologisme de Marx et Engels. On pourrait schématiser cette controverse en affirmant que deux positions antagonistes s’y sont exprimées.
La première (…) considère que la pensée de Marx et Engels est profondément structurée par une forme de productivisme.”
“Certains textes marxiens sur le rôle des machines dans les Grundrisse témoigneraient par exemple d’une adhésion sans faille à l’idéal du développement technique et l’augmentation de la productivité industrielle.”
“L’autre approche (…) insiste au contraire sur la dimension écologiste de la pensée marxienne, allant jusqu’à affirmer qu’on pourrait y trouver une pensée écologiste systématique.”
“Dans ce débat, il nous semble que les positions les plus caricaturales ont été tenues et qu’il convient plutôt d’échapper à l’idée que Marx aurait été un “ange vert” ou un “démon productiviste”, pour reprendre les mots de Daniel Bensaïd. C’est la perspective adoptée par Timothée Haug dans sa thèse de doctorat intitulée “La rupture écologique dans l’oeuvre de Marx : analyse d’une métamorphose inachevée du paradigme de la production”.
“L’auteur démontre que Marx a amorcé une transformation radicale du paradigme productiviste qu’il défendait dans ses premières années (…), mais que cette transformation inachevée laisse en place des schèmes productivistes jusqu’à la fin de son oeuvre. Il faudrait donc penser, dans le corpus marxien, un abandon progressif du productivisme au profit de l’écologisme(…).“