Sur les bulles de filtre

Quel est l’intérêt de se cloisonner dans des bulles de filtres et “prêcher” dans le désert?
Vous savez le danger des bulles de filtres n’est-ce pas?
Si chacun commence à bloquer (et encore, merci papa Facebook d’avoir implémenté cette fonctionnalité*). c’est le vrai cloisonnement. Dans ce cas-là il n’y a plus de dynamique du tout, chacun reste dans son microcosme…mais dans ce cas à quoi bon être en démocratie?

* Facebook pourrait très bien implémenter d’autres fonctionnalités, par exemple bloquer/rendre invisible systématiquement tout message contenant certains mots définis par l’utilisateur. Serait-ce pour autant une bonne chose de l’employer? Imaginons que quelqu’un l’emploie avec le mot “climat”…

Bon pote :
Il existe plus d’une centaine de biais cognitifs. Un biais cognitif se définit comme ‘une cause, une raison, une justification ou une explication possible et envisageable entraînant un décalage ou entrave au raisonnement logique. En d’autres termes, c’est une distorsion d’une information au niveau cognitif c’est-à-dire au niveau des processus mentaux liée principalement à la connaissance. Les biais cognitifs sont nombreux, passionnants et surtout omniprésents‘.
L’utilité d’une croyance prime sur la véracité ou la fausseté de son objet. Le fait de croire en quelque chose donne un sens à l’existence et influence nos comportements, même quand ladite croyance se révèle non fondée. Sans surprise, plus les croyances sont profondément ancrées, moins elles supportent le changement. Ainsi, les biais de confirmation nous poussent parfois à ignorer des informations contredisant nos croyances. Qui n’a jamais fermé les yeux sur une information qui remettait en doute une de ses opinions ?
(…)

Pourquoi sortir de l’effet bulle

Avant toute chose, sortir de l’effet bulle favorisera votre esprit critique. Il est extrêmement dur de s’extraire des biais de confirmation, et c’est sans aucun doute la meilleure raison d’en sortir. Encore une fois, personne n’y échappe. Du branleur parisien financier au militant Greenpeace anti-nucléaire depuis sa naissance… Sans oublier certains de nos politiques, qui malgré leurs diplômes et carrières, sont parfois complètement hors-sol.
Ainsi, j’ai trouvé très intéressante la proposition d’Eli Pariser lors de son TED qui proposait que nous puissions trier notre fil d’actualité Facebook fonction de plusieurs critères, parmi lesquels la pertinence, mais aussi les nouvelles ‘stimulantes’, ‘dérangeantes’, ‘autres points de vue’…
Effet bulle et les solutions pour en sortir
C’est à force de débattre avec des personnes que nous améliorons notre propre pensée et nos arguments pour répondre/réfuter plus rapidement une personne. C’est à force de débattre chaque jour (je dis bien chaque jour) que j’ai aiguisé mon esprit critique.

Renforcement de l’entre-soi idéologique et fragmentation de la réalité sociale
Ce constat un tant soit peu dramatique est susceptible d’entraîner des conséquences directs sur la politisation des individus. L’entre-soi idéologique serait donc favorisé par Internet et plus particulièrement par les réseaux sociaux.” (source )

C’est à force de débattre avec des personnes que nous améliorons notre propre pensée
Et cette posture, à laquelle j’adhère totalement, est ce qu’on pourrait appeler un esprit “Hegelien de dépassement par la critique” par opposition à la posture partisane, imperméable à la vérité, qui risque de la fragiliser.

Dans “Le totalitarisme informatique”, Christopher Pollman écrit, dans le chapitre III
“La destruction de la vie individuelle et collective” :”Les dispositifs informatiques génèrent de multiples effets nocifs pour la vie et la société humaines. “passé un certain seuil, l’outil asservit celui qui l’utilise”; il “porte atteinte à la fonction (notamment motrice ou cérébrale) qu’il est censé amplifier”. Résumant une démonstration implacable, Olivier Roy n’hésite pas à déclarer qu’Internet “n’invente pas une nouvelle culture mais détruit l’idée même de culture”. (…)3. Un facteur de désocialisation et de désinhibition des adultes(…) L’informatique devient le “facteur planétaire d’une colossale désintégration sociale”, d’une “dissolution politique de l’espère humaine”.On peut distinguer trois formes de détachement :
– la désaffection “qui est la perte de d’individuation psychique” par la “saturation affective” due à l’hypersocialisation consommatoire de l’attention;
– la désaffectation qui est la “perte d’individuation sociale”, c’est-à-dire la perte de place et de reconnaissance sociales;
– la désaffiliation par rapport aux liens sociaux (…)
Les écrans tendent donc à saper l’intériorité.Celle-ci souffre aussi du recul du brassage d’idées, donc de stimulation extérieure. À la fois dans l’espace public où l’individu connecté tourne, via son écran ou ses écouteurs, dans son propre monde sans entrer en relation avec les personnes à côté (aux États-Unis, 65% des piétons et 91% des piétons jeunes consultent leur smartphone en marchant), et sur le plan médiatique du fait de l’information personnalisée en fonction des seuls centres d’intérêts personnels.
Mais recul aussi sur les “réseaux sociaux, première expérience globale de la ruche humaine”, qui automatisent et rationalisent les relations sociales, voire l’amitié : ils ne sont en réalité sociaux que dans un sens réduit, identitaire, car ils visent à échanger uniquement avec des gens ou des entreprises dont vous vous sentez proches”. Or, la quête identitaire relève d’une course sans fin. Ce nombrilisme “solipsiste” pourrait se solder par “l’effondrement de l’individu sur lui-même.”



Revenir au réalisme