Théories de la valeur (économique) [en construction]

«La méthode d’analyse que j’ai employée, et qui n’avait pas encore été appliquée aux sujets économiques, rend assez ardue la lecture des premiers chapitres, et il est à craindre que le public français, toujours impatient de conclure, avide de connaître le rapport des principes généraux avec les questions immédiates qui le passionnent, ne se rebute parce qu’il n’aura pu tout d’abord passer outre. C’est là un désavantage contre lequel je ne puis rien si ce n’est toutefois prévenir et prémunir les lecteurs soucieux de vérité. Il n’y a pas de route royale pour la science, et ceux-là seulement ont chance d’arriver à ses sommets lumineux qui ne craignent pas de se fatiguer à gravir ses sentiers escarpés.» Karl Marx ⭎
Le but d’une théorie de la valeur est de déterminer le prix (ou la valeur d’échange) d’un bien. Il y a deux grandes approches : l’approche par la valeur travail (objective) et l’approche “marginaliste” (en partie subjective).
La valeur ⭎ (économique) est un concept fondamental en économie. Historiquement, deux définitions de la valeur ont été considérées (par Aristote au départ) :
– la valeur d’usage ⭎, qui est liée au besoin, à l’utilité et donc qui renferme un certain caractère subjectif. Nous passons notre vie à produire de la valeur d’usage, mais elles n’ont pas toutes une valeur économique.
“Le choix de celles qui ont une valeur économique, ça renvoie à la violence sociale” (Bernard Friot ⭎ dans cet interview ⭎), car dans une économie capitaliste, ce sont ceux qui détiennent les outils de production qui décident de ce qui a une valeur économique (par exemple en faisant rentrer des activités de la sphère non-marchande dans la sphère marchande, comme l’explique Timothée Parrique)
– la valeur d’échange ⭎, qui est liée aux conditions de la production du bien, et qui détermine le prix dans le cas d’un échange monétaire (qui est un des modes d’allocation d’un bien).
Les théories de la valeur qui se sont développées au cours du 19ème siècle avaient à répondre notamment au paradoxe de l’eau et du diamant ⭎ :
Comment expliquer que la valeur d’usage de l’eau est beaucoup plus élevée que celle du diamant, alors qu’en même temps, sa valeur d’échange est beaucoup moins élevée que celle du diamant?
Conceptions subjectives et objectives de la valeur
Avant de mieux comprendre les théories de la valeur que les différents économistes et écoles de pensées économiques ont proposées, il peut être utile de regarder ce concept de valeur sous un autre angle, celui du caractère objectif ou subjectif de sa définition, qui caractérise plus ou moins fortement la nature de la valeur d’usage et de la valeur d’échange.
Il existe trois définitions de la valeur selon le courant de pensée économique. Elles se rattachent à trois conceptions principales qui donnent au mot “valeur” des sens radicalement différents, et impliquent trois relations différentes entre valeur et prix.
– La conception subjective définit la valeur comme l’expression de l’intérêt qu’un agent particulier porte à un bien ou à un service, qui résulte d’un processus psychologique d’évaluation, qui ne relève pas de l’économie, et qui constitue une donnée externe pour le raisonnement économique.
La conception subjective est dominante depuis l’origine de la pensée économique (Aristote, Thomas d’Aquin). Elle a été maintenue par les classiques français (Turgot, Say) puis par les néoclassiques. Elle se fonde sur la notion d’utilité, attribuant à chaque personne des goûts et des besoins différents. (approche individualiste bottom-up)
Le prix est une notion distincte, qui résulte du fonctionnement effectif des mécanismes du marché, et qui seul a un sens économique. Pour les classiques, il y a donc deux processus distincts :
– la formation de la valeur (subjective, hors-champ de l’économie)
– la formation du prix (par les mécanismes de marché : rencontre offre/demande, enchères, négociation, affichage “unilatéral”, …)
– La conception objective pose que tout bien a une valeur indépendante de l’observateur, qui résulte des conditions de sa production et peut être déterminée par un calcul économique à partir des conditions et des coûts de production du bien ou du service. Le prix est alors généralement considéré comme une mesure de cette valeur.
la conception objective a été proposée d’abord par les Physiocrates avec comme référence la terre, puis par les classiques anglais avec comme référence le travail (avec la théorie de la valeur travail de A. Smith et Ricardo), et enfin reprise par les économistes marxistes.
– La conception “hybride” à partir du bons sens de notre expérience : la valeur de quelque chose pour quelqu’un augmente avec son utilité et diminue avec ce qu’elle lui coûte :
Valeur = utilités / coûts = satisfaction des besoins / ressources consommées
Cette autre conception de la valeur, issue de la pensée systémique, intègre les deux dimensions citées plus haut :
– l’utilité, les besoins sont subjectifs. Leur mesure ou leur évaluation sont quantifiables mais pas en termes financiers. Les besoins à satisfaire incluent l’utilité rationnelle mais aussi la beauté, le bon, le vrai … et sont intimement liés aux ‘valeurs’ de chaque personne.
– les ressources consommées sont objectives : elles incluent les coûts financiers ET les autres ressources consommées : matières, énergies, temps, inconfort… Une partie seulement est quantifiable en termes financiers.
Notons que même le coût financier de quelque chose -son prix objectif- sera ressenti comme très différent selon la situation financière des personnes : l’argent a un coût subjectif…
– Le rapport entre les deux est aussi subjectif (puisque le numérateur est subjectif) : c’est la perception par la personne de l’impact de la chose, de l’équilibre entre utilités et coûts. Il n’a pas de grandeur propre, de mesure absolue.
Théorie de la valeur d’Adam Smith
Le but d’Adam Smith est donc de déterminer le prix d’un bien (sa valeur d’échange) en fonction des coûts (objectifs) de production.
Smith se rend compte que la valeur d’échange n’est pas corrélée à la valeur d’usage, sinon l’eau coûterait très cher. Il va répondre au paradoxe de l’eau et du diamant en introduisant la notion de valeur travail ⭎.
La valeur d’échange du diamant est plus élevée car il a fallu extraire la pierre, la travailler, … La valeur d’échange est une mesure de la quantité de travail, qu’il appelle donc valeur-travail.
Il s’ensuit un prix naturel des biens qui couvre donc les coûts de production (directs et indirects), mesurés en heures de travail. C’est en tout cas son objectif, qui permettrait donc de déterminer le rapport entre les valeurs d’échange de deux bien sur base uniquement du temps de travail nécéssaire à leur production.
Dans La richesse des nations, il part d’un exemple (modèle simple) lié à la chasse dans une société préhistorique.
Il part des hypothèses suivantes:
– pour chasser et tuer un daim, il faut 2h de travail : 1h pour fabriquer un arc à flèches à usage unique (coût indirect) et 1h pour chasser et tuer le daim (coût direct).
La valeur-travail d’un daim est donc de 2h.
– pour chasser et tuer un castor, il faut 6h de travail : 4h pour fabriquer un piège à usage unique (coût indirect) et 2h pour chasser et tuer le castor (coût direct)
La valeur-travail d’un castor est donc de 6h.

Le rapport entre la valeur d’un castor et celle d’un daim est donc de 3 : 1 castor s’échange contre 3 daims, car les coûts de production (directs + indirects) en termes d’heures de travail sont 3 fois supérieurs pour un castor que pour un daim.
Si on considère qu’1h de travail vaut 10€ :

Jusqu’ici, tout va bien. Pour rendre ce modèle hyper-simpliste plus réaliste, on pourrait considérer que les outils de production (l’arc et le piège) ne sont pas à usage unique, mais peuvent servir plusieurs fois.
Si l’arc à flèches peut être utilisé X fois avant de devoir être remplacé, la valeur d’échange/valeur travail d’un daim diminue, car les coûts de production (indirects ici) auront été divisés par X, car le coût-valeur travail de l’arc (indirect) aura été réparti sur X daims:

La valeur d’échange d’un daim tend vers son coût direct quand X tend vers l’infini
Le prix d’un produit est donc tout le travail direct et indirect (temps de travail, outils de production, consommation intermédiaire, …) nécéssaire à sa production.
Cette théorie se heurte directement à des questions:
Un tableau de Picasso se vend des dizaines de millions d’euros, or Picasso n’a pas passé des dizaines de millions d’heures à peindre le tableau.
De plus, le daim d’un chasseur qui a mis 5h à le chasser n’a pas une valeur 5 fois plus élevée que celle d’un d’aim qui a été chassé en 1h.
Pour répondre à la première question, on distingue deux types de biens :
– les biens reproductibles, dont la valeur dépend de la quantité de travail
– les biens non-reproductibles, comme un tableau de Picasso, dont la valeur dépend de la rareté, ou de la demande.
Et on dit que l’essentiel des biens sur le marchés sont produits industriellement, et que par conséquent les biens non-reproductibles sont une question “à la marge”, et on peut donc passer à la deuxième question.
À laquelle il répond en affirmant que la valeur d’un daim est la valeur travail moyenne de tous les chasseurs. Si celle-ci est de 1h, alors le chasseur qui a mis 5h devra quand même s’aligner sur la valeur moyenne s’il veut vendre son daim. Il y a un alignement du prix sur la productivité moyenne.
Cependant, l’exemple préhistorique, où chacun récoltait le fruit de son travail, ne fonctionne pas dans nos sociétés actuelles (et de son époque), où la valeur d’un bien ne comprend pas uniquement la valeur travail, mais aussi les rentes et les profits:

Dans ce cas, est-ce que la valeur d’échange dun daim est-elle toujours déterminée par sa valeur travail, c’est-à-dire par la quantité de travail nécéssaire à sa production?
Si par exemple les daims se trouvent sur une zone où il faut payer une rente, et que cette rente est de 50%, alors le chasseur devra passer 2 fois 1h pour chasser deux daims, en laisser la moitié, donc un, pour payer la rente, et avoir au final un daim:

Dans ce cas la valeur-travail (directe) d’un daim aura doublé, et devient égale à celle d’un castor, qui nécéssite aussi 2h pour être chassé (mais sur zones sans rente à devoir payer), et ce alors qu’il faut toujours 1h pour chasser un daim:

On voit donc qu’avec la prise en compte des rentes et des profits, les valeurs d’échange ne correspondent plus au temps de travail nécéssaire pour les produire. Il faur ajouter aux valeurs d’échange la rente et les profits.
Or la rente et les profits ne peuvent pas être assimilés à du travail, puisque par principe c’est percevoir de l’argent sans rien faire.
Smith montre que les profits ne sont pas proportionnels au temps de travail, mais au montant investi : le volmue de profit, pour un taux de profit donné, augmente à mesure que l’investissement de départ augmente.

La théorie de la valeur travail de Smith se heurte donc à ces deux composantes dans la valeur d’échange d’un bien que sont les rentes et les profits, qui ne sont pas liées au travail.
Pour pallier à ce défaut, il adaptera sa théorie en théorie de la valeur commandée (la valeur d’un bien est déterminée par la quantité d’heure de travail qu’on peut acheter avec), mais son caractère circulaire n’en fera pas un succès.
C’est Ricardo qui généralisera la theorie de la valeur de Smith en y intégrant les rentes et les profits.
(Largement inspiré de cette vidéo ⭎ de Des économistes et des hommes)
Théorie de la valeur de Ricardo
Ricardo va généraliser la théorie de la valeur (travail) de Smith en intégrant les rentes et les profits.
Il va montrer d’une part que la rente est aussi une fonction de la quantité de travail, et d’autre part qu’il en est de même pour les profits!
Ce qui “consolidera” la théorie “originale” de la valeur de Smith, dont l’objectif était de déterminer objectivement la valeur d’échange d’un bien sur base de ses coûts (objectifs) de production.
1) Les rentes
Ricardo adapte le modèle hyper-simpliste de Smith, en considérant 3 parcelles de densité de daim différentes :
– une première parcelle de densité D1, où un daim se chasse en 1h, et où il y a une rente
– une deuxième parcelle de densité D2<D1, où un daim se chasse en 2h, et où il y a une rente
– une troisième parcelle de densité D3<D2, où un daim se chasse en 3h, et où il n’y a pas de rente :

Il fait ensuite les hypothèses suivantes:
– Il y a une forte demande en daims
– il y a une concurrence “parfaite”
– L’arc à flèche peut servir une infinité de fois (on néglige son coût)
Dans ce cas, la valeur d’échange (le prix p) d’un daim va s’aligner sur celle sur la parcelle la moins productive, donc à 3h de travail. En effet:
– Si p < 3h, personne n’ira chasser sur la 3ème parcelle, puisque la valeur d’échange d’un daim serait inférieure à sa valeur travail sur cette parcelle
– Si p > 3h, tout le monde irait chasser sur la 3ème parcelle, puisque la valeur d’échange d’un daim serait supérieure à sa valeur travail sur cette parcelle.
Par conséquent “le mécanisme concurrentiel de marché” fixe naturellement le prix d’un daim à 3h de travail.
A leur tour, et conséquamment à la fixation “naturelle” du prix, les rentes sur la première et sur la deuxième parcelle sont déduites / déterminées:
– Comme la valeur d’échange d’un daim est de 3h, et qu’il faut 1h pour chasser un daim sur la première parcelle, cela “fixe” la rente à 2h.
– Comme la valeur d’échange d’un daim est de 3h, et qu’il faut 2h pour chasser un daim sur cla deuxième parcelle, cela “fixe” la rente à 1h.
Si on considère qu’1h de travail vaut 10€ :

Comme la valeur d’échange d’un daim est déterminée par sa valeur travail sur la parcelle la moins productive, la composante “rente” de la valeur d’échange, dans les calculs, peut être remplacée par cette valeur travail qui fixe le prix (ici 3h * 10€/h = 30€) :

Reste à faire “la même chose” en ce qui concerne les profits pour avoir une théorie de la valeur (travail) généralisée, et ainsi déterminer la valeur d’échange (le prix) d’un bien sur base de ses coûts de production directs et indirects objectifs.
2) Les profits
Dans une société capitaliste, le chasseur n’a que sa force de travail et n’a pas les moyens de production (ici l’arc à flèche). Il va donc offrir sa force de travail à un capitaliste, qui mettra à sa disposition l’outil de production. En retour, le capitaliste exigera un profit.
Comment est déterminé ce taux de profit? Selon Ricardo, il devra s’aligner sur le taux de profit des autres industries du marché. En effet:
– Si le taux de profit dans le secteur de la chasse est inférieur à celui du reste de l’économie, personne ne voudrait y investir son argent.
– À l’inverse, si le taux de profit est supérieur, tout le monde voudrait y investir, ce qui augmenterait la concurrence dans le secteur de la chasse, et ramènerait le taux de profit au taux du reste de l’économie.
Faisons donc les hypothèses suivantes:
– le taux de profit est de X%
– Le coût du travail est de 10€/h
Dans ce cas :
– Pour l’entreprise de daims, les coûts de production s’élèvent toujorus à 20€ : 10€ de coûts directs (1h de travail pour chasser et tuer le daim) et 10€ de coûts indirects (la fabrication de l’arc à flèches)
Pour faire un profit de X%, l’entreprise vendra le daim à un prix pd = (100+X)% * 20€.
Par exemple, si le taux de profit est de 100%, pd = 200% * 20€ = 2 * 20€ = 40€.
– Pour l’entreprise de castors, les coûts de production s’élèvent toujours à 60€ : 20€ de coûts directs et 40€ de coûts indirects.
Pour faire un profit de X%, l’entreprise vendra le castor à un prix pc = (100+X)% * 60€.
Par exemple, si le taux de profit est de 100%, pc = 200% * 60€ = 2 * 60€ = 120€

On voit donc que la prise en compte des profits ne modifie par la valeur relative du castor par rapport au daim. En effet, le rapport des deux est indépendant du taux de profit X :
pc / pd = 120€ / 40€ = 3
pc / pd = [ (100+X)% * valeur travail castor ] / [ (100+X%) * valeur travail daim ]
pc / pd = valeur travail castor / valeur travail daim = 60€ / 20€ = 3

Le rapport des valeurs d’échange continuent donc d’être déterminés uniquement par la quantité de travail (direct et indirect) nécéssaires à leur production.
La théorie de la valeur d’Adam Smith “coinçait” car selon lui, les profits, qui composent la valeur d’échange, étaient indépendants de la valeur travail, c’est-à-dire du temps de travail. Pour Adam Smith, les profits étaient proportionnels au montant investi.
Ricardo montre que les profits, bien qu’ils soient proportionnels au montant investi, sont également proportionnels au temps de travail.
En effet, pour un taux de profit de X%, le profit π est directement proportionnel aux coûts de production (la somme des coûts directs et indirets) : π = (100+X)% * coûts.
Dans le cas de cet exemple, les coûts directs sont la quantité d’heures de chasses versées en salaire, et les coûts indirets sont ceux de l’arc à flèche ou du piège, qui sont eux aussi proportionnels à la quantité d’heures de travail nécéssaire pour les fabriquer :

L’entreprise de castors a réalisé un profit 3 fois supérieur à celui de l’entreprise de daims, et a investi un montant 3 fois supérieur, car les coûts directs et indirects de la chasse au castor sont 3 fois plus élevés que ceux de la chasse au daim :

La théorie “tient bon” jusqu’à présent, mais on a supposé que l’entreprise fabriquait elle-même ses outils de production. Or dans la réalité, ce n’est pas le cas : il y a plusieurs entreprises sur le marché qui font chacune un profit, et se fabriquent les moyens de production les unes aux autres.
Considérons une situation simple avec trois entreprises:
– une entreprise A qui fabrique des arcs à flèches et des pièges
– une entreprise B qui chasse des castors
– une entreprise C qui chasse des daims
Et admettons que chacune réalise un taux de profit de X% = 100% :

Dans ce cas il y a deux profits à prendre en compte:
– l’entreprise A fera fabriquer un piège qui lui coûte 4h de travail direct.
Pour réaliser un profit de X%, elle le vendra (100+X)% * 40€, soit 80€ si le taux de profit est de 100%.
– l’entreprise B achète un piège à 80€ à l’entreprise A qui constitue son moyen de production (coût indirect), et chasse un castor qui lui coûte 2h de travail direct. Ses coûts de production sont donc de 80€+20€ = 100€.
Pour réaliser un profit de X%, elle vendra le castor à un prix pc = (100+X)% * 100€, soit 200€ si le taux de profit est de 100%.
Le raisonnement est le même pour la chaîne de production des daims : pd = (100+X)% * 30€, soit 60€ si le taux de profit est de 100%.
On observe que le rapport des valeurs d’échanges du castor et du daim n’est plus d’exactement 3 comme précédemment :
pc / pd = 200€ / 60€ = 3,33
pc / pd = [(100+X)% * [((100+X)% * 40€) + 20€ ]] / [(100+X)% * [((100+X)% * 10€) + 10€ ]]
Mais dépend du taux de profit!

En définissant x = X / 100, et t = 1 + x, on écrit plus simplement:
pc / pd = t * ((t * 40€) + 20€) / t * ((t * 10€) + 10€)
Ou encore, en appelant f(t) le rapport pc / pd :
f(t) = ((t * 40€) + 20€) / ((t * 10€) + 10€), soit en graphique ⭎:

Ce rapport dépend évidemment du volume des coûts directs et indirects respectifs.
En prenant en compte les profits, la valeur relative du castor a augmenté, car ses coûts de production indirects plus élevés proviennent d’un volume de profit plus élevé (volume qui est proportionnel au temps de travail pour construire un piège, qui est plus élevé que celui pour contruire un arc).
Avec des taux de profits plus réalistes, l’écart demeure faible :

Mais malgré tout, le rapport des valeurs d’échange s’écarte de 3, qui représente le rapport des coûts (objectifs) de travail directs et indirects.
Ricardo en concluera que la théorie de la valeur travail “fonctionne”, mais “à ~90-95%”.
Pour résumer:
– Pour Adam Smith, un castor valait 3 fois plus qu’un daim, car après avoir pris en compte le travail, les rentes et les profits, il coûtait 3 fois plus cher de chasser un castor qu’un daim.
– Pour Ricardo, un castor vaut ~3 fois plus qu’un daim, car il faut environ 3 fois plus de travail direct et indirect pour chasser un castor que pour chasser un daim.
Sur la richesse créée par le travail, une partie formera la rente (en fonction des écarts de productivité dans chacun des secteurs) et une autre le profit (en fonction du taux de profit moyen dans l’économie).

Le rapport entre la valeur d’échange (le prix) d’un castor et celle d’un daim se ramène donc à une certaine quantité de travail, et peut donc être déterminé objectivement.
C’est la théorie de la valeur travail.

(Largement inspiré de cette vidéo ⭎ de Des économistes et des hommes)
Théorie de la valeur de Marx
“Dans tous les cas il y a une chose bien claire : la nature ne produit pas d’un côté des possesseurs d’argent ou de marchandises et de l’autre des possesseurs de leurs propres forces de travail purement et simplement. Un tel rapport n’a aucun fondement naturel, et ce n’est pas non plus un rapport social commun à toutes les périodes de l’histoire. Il est évidemment le résultat d’un développement historique préliminaire, le produit d’un grand nombre de révolutions économiques, issu de la destruction de toute une série de vieilles formes de production sociale.” (Karl Marx, Le capital ⭎, livre 1, section 2)
Marx va reprendre la théorie de la valeur de Ricardo et y ajouter deux principes qui lui permettront de déduire la baisse tendancielle des taux de profits:
1) le profit représente une ponction sur la richesse créée par le travail
Marx considère l’angle sous lequel le profit représente une partie de la richesse créée par le travail.
Le capitaliste va prélever un profit sur la production (le castor) qui est le fruit de l’association de travail (direct) et de capital (qui est du travail passé, indirect).

2) Un échange de marchandise ou de capital ne peut pas générer de plus-value.
La plus-value est la différence entre les coûrs de production (coûts directs et indirects) et le prix de vente, ou valeur d’échange :

Marc considère d’une part que la plue-value ne peut pas provenir du capital, dans ce cas-ci de l’échange (vente / achat d’un piège). En effet, le capital coûte autant que la valeur qu’il transmet à la marchandise : si le piège coûte 4h de travail (indirect), il représentera 4h de valeur-travail dans la valeur totale de 6h d’un castor :

Ce principe implique qu’un capital donné ne peut pas générer plusieurs fois de la plus-value : cela améliore donc la théorie de la valeur de Ricardo, dans la mesure où le rapport des valeurs “castor” et “daim” ne dépend à nouveau plus du taux de profit (cette dépendance provenait de la “propagation en cascade” des profits des capitaux antérieurs, cfr l’exemple avec l’entreprise A et l’entreprise B).
Cela pose un problème, car cela “implique que les secteurs plus intenses en travail rapportent plus de profits que les secteurs plus intenses en capital (c’est le « problème de la transformation »).
Or, cela est incompatible avec l’idée que les taux de profit doivent être à peu près égaux dans les différents secteurs économiques.
La solution proposée par Marx est que
– le prix des produits les plus intenses en capital est en réalité supérieur à la quantité de travail (directe et indirecte) nécessaire à sa fabrication,
– et inversement pour le prix des produits les moins intenses en capital, qui se vendent moins chers que leur valeur en travail.
Globalement, le travail reste donc à l’origine de l’ensemble de la valeur créée dans l’économie (les prix plus élevés d’un côté étant compensés par les prix plus faibles de l’autre), mais il y a au sein de chaque secteur une différence entre le prix d’un bien et la quantité de travail incorporé dedans (différence qui s’explique par la plus ou moins forte proportion de capital dans la production du bien considéré)“
Si la plus-value ne provient pas de la composante “capital” (de la valeur du piège), alors elle provient forcément du travail. Le salaire du chasseur est donc inférieur à la valeur créée par son travail:


Pourquoi le travailleur accepte-t-il de vendre (“brader”) sa force de travail à une valeur inféieure (son salaire) à la valeur qu’elle crée?
En gros, car “il n’a pas le choix”, n”ayant pas de capital. Et le capitaliste “n’a aps le choix” non plus de recourir à de la force de travail pour créer de la valeur.
Marx écrit dans “Le Capital ⭎, livre 1 section 2 :
“La transformation de l’argent en capital exige donc que le possesseur d’argent trouve sur le marché le travailleur libre, et libre à un double point de vue. Premièrement le travailleur doit être une personne libre, disposant à son gré de sa force de travail comme de sa marchandise à lui ; secondement, il doit n’avoir pas d’autre marchandise à vendre ; être, pour ainsi dire, libre de tout, complètement dépourvu des choses nécessaires à la réalisation de sa puissance travailleuse.
Pourquoi ce travailleur libre se trouve‑t‑il dans la sphère de la circulation ? C’est là une question qui n’intéresse guère le possesseur d’argent pour lequel le marché du travail n’est qu’un embranchement particulier du marché des marchandises ; et pour le moment elle ne nous intéresse pas davantage. Théoriquement nous nous en tenons au fait, comme lui pratiquement.“

Reprenons l’exemple de la chasse aux castor et introduisons quelques nouvelles définitions.
– Marx distingues les coûts de production : il appelle “capital variable ⭎” (V) les coûts directs (force de travail) et “capital fixe ⭎” (F) (ou constant) les coûts indirects (les outils de production), car seul le capital variable permet de produire de la valeur (de la plus-value) :

Le capital variable V est donc égal à la somme de la plus-value gagnée par le capitaliste (Pl) (ou le temps de travail non-rémunéré) et du salaire S qu’il vers au travailleur (ou le temps de travail rémunéré) :
V = Pl + S
– La composition organique du capital ⭎ (C) est le rapport entre le capital fixe (F) et le capital variable (V):
C = F / V
– le taux d’exploitation ⭎ Te, qui est le rapport entre la plus-value gagnée par le capitaliste (Pl), et le salaire qu’il verse au travailleur (S) :
Te = Pl / S
Qu’on peut réécrire:
Te = (V – S) / S = (V / S) – 1
Ou
Te = Pl / (V – Pl) = [ (V / Pl) – 1 ]-1
Par exemple, si la capital variable V est de 2h, et que le salaire versé est de 1h :
Te = (V / S) – 1 = (2h / 1h) – 1 = 1 = 100%



– Le taux de profit Tp, qui est le rapport entre la plus-value créée par le capitaliste (Pl) et l’association du travail (capital variable, V) et du capital (capital fixe, F) :
Tp = Pl / (V + F)

Imaginons maintenant qu’il y ait plusieurs entreprises de chasse au castor en concurrence. Chacune des entreprises a les mêmes coûts de production : chacune a besoin de pièges (qui ont une valeur travail de 4h, sous forme de capital fixe) et de chasseurs (qui représentent une valeur travail de 2h, sous forme de capital variable) :

Imaginons à présent que l’entreprise 1 fasse l’acquisition d’un deuxième piège (elle augmente son capital fixe), et que grâce à ce deuxième piège, elle permet à son chasseur de capturer deux castors en 2h au lieu d’un seul : l’entreprise 1 devient plus compétitive.
En effet, pour capturer 2 castors, il lui faudra 2x4h = 8h de capital fixe (les deux pièges) mais toujours 2h de capital variable (le travail du chasseur) :

Autrement dit, elle a diminué le coût unitaire d’un castor : il passe de 6h à 10h/2 = 5h.
Par castor, ces 5h sont constituées de 4h de capital fixe et de 1h de capital variable :

On voit que cela augmente le taux de profit de l’entreprise 1.
En effet, si le taux d’exploitation reste le même, elle prélèvera toujours la même fraction du capital variable, qui n’est plus ici que de 1h, soit donc 30min.
Or, le prix du marché reste inchangé, donc elle vendra le castor à une valeur travail de 6h qui est ce prix du marché (ligne pointillée rouge sur l’image ci-dessous)
Donc le profit réalisé est augmenté de cette différence entre ce prix du marché (6h) et ses coûts de production (V+F = 1h + 4h = 5h), qui s’ajoute donc à la plus-value.
Le taux de profit, qui représente le rapport entre le profit et le prix de vente du castor, sera alors plus élevé:
Tp = (30min + 1h) / (6h) = 0,25 = 25%

Mais dans ce cas-là, par le jeu de la concurrence, les autres entreprises vont également vouloir augmenter leur taux de profit, et vont donc égalemnt investir dans un second piège.
Par conséquent, toutes les entreprises finiront par diminuer de la même façon leur coût de production, et le prix du marché (hors accord oligopolistique, donc en situation de concurrence parfaite) se réajustera à la valeur des coûts de production:

On constate alors que le taux de profit a diminué : de 16,7% dans la situation de départ, il passe à 10 % :
Tp = Pl / (V + F) = 30min / (1h + 4h) = 10%

On peut montrer que le taux de profit diminue quand la composition organique du capital augmente, c’est-à-dire quand la part de capital fixe dans les coûts de production augmente.
En effet, on peut exprimer la somme du capital fixe (F) et du capital variable (V) en fonction de la composition organique du capital (C):
V+F = (V/V) * (V+F) = V * (1 + F/V) = V * (1 + C)
De sorte que le taux de profit est ivnersément proportionnel à C :
Tp = Pl / (V+F) = Pl / (V * (1 + C))
Or, l’augmentation de C, c’est justement ce qu’il se produit lorsqu’une entreprise veut améliorer sa compétitivité afin d’augmenter son taux de profit : elle investit du capital.
Puisque la part de capital fixe dans les coûts de production augmente, et que le profit représente une fraction constante du capital variable (du travail) donnée par le taux d’exploitation, il s’ensuit une diminution progressive des taux de profit : c’est ce qu’on appelle la baisse tendancielle des taux de profits ⭎ :

Le capitalisme est donc voué à s’effondrer par les mécanismes-mêmes qui permettent son expansion :
– l’exploitation des travailleurs
– la recherche du profit
– l’accumulation de capital.
Marx analyse des contre-mécanismes qui permettraient d’empêcher ou de freiner la baisse tendancielle des taux de profits.
Le premier est évidemment d’augmenter le taux d’exploitation à mesure que la composition organique du capital augmente, de manière à maintenir un taux de profit constant.
En effet, on peut exprimer le taux de profit Tp en fonction de la composition organique du capital (C = F/V) et du taux d’exploitation (Te = (V/S) – 1), en sachant que Pl+S = V :
Tp = Pl / (V + F) = (V – S) / (V + F)
Tp = S * ((V/S) – 1) / (V * (1 + C)) = S * Te / (V * (1 + C))
Tp = (S/V) * (Te / (1 + C)
Tp = (Te / Te + 1) * (1 / (1 + C))
On voit donc que pour obtenir le taux de profit désiré Tp pour une composition organique du capital C donnée, il suffit d’ajuster le taux d’exploitation Te.
Mais ce mécanisme a une limite :
– non seulement il faut que le travailleur puisse continuer à se nourrir pour garder sa force de travail. Marx écrit dans Le Capital ⭎ livre 1 section 2 :
“En tant que valeur, la force de travail représente le quantum de travail social réalisé en elle. Mais elle n’existe en fait que comme puissance ou faculté de l’individu vivant. L’individu étant donné, il produit sa force vitale en se reproduisant ou en se conservant lui‑même. Pour son entretien ou pour sa conservation, il a besoin d’une certaine somme de moyens de subsistance. Le temps de travail nécessaire à la production de la force de travail se résout donc dans le temps de travail nécessaire à la production de ces moyens de subsistance ; ou bien la force de travail a juste la valeur des moyens de subsistance nécessaires à celui qui la met en jeu.
(Est-ce à dire que la valeur travail n’est définie que relativement aux besoins de subsistance, selon Marx? Est-ce à dire que si par exemple demain nous n’avons plus “besoin” de voiture, ou que l’eau devient gratuite (j’invente pour les besoins de l’illustration), suivant les analyses de Marx, le capitaliste devrait réduire le salaire, puisque les (coûts des) besoins de subsistance du travailleur auraient diminué? Marx montre comment le capitaliste va “plafonner” la plus-value en “minimisant”/ajustant le salaire pour qu’il corresponde aux besoins de subsistance.
Alors que si la valeur du travail est au contraire définie de façon absolue, c’est à la plus-value de s’ajuster au salaire (étant contrainte par l’identité plus-value + salaires = prix – coûts de production, et que le membre de droite est constant ici.
Il écrit d’ailleurs plus loin:
“Comme la force de travail équivaut à une somme déterminée de moyens de subsistance, sa valeur change donc avec leur valeur, c’est‑à‑dire proportionnellement au temps de travail nécessaire à leur production.“ !
N’est-ce pas là partir d’une logique avantageuse pour le capitaliste?
Par exemple, la logique “temps-plein ou rien” ne trouve-t-elle des sources dans cette façon de concevoir la valeur du travail? Si la valeur du travail est fixée a priori, et que le coût de la vie diminue, cela augmente le pouvoir d’achat du travailleur. Il pourrait décider de travailler moins d’heure tout en continuant à pouvoir assurer ses besoins de subsistance. En revanche, si le coût de la vie augmente, la même logique perdure : le capitaliste devra augmenter le salaire pour assurer les besoins de subsistance du travailleur, s’il veut continuer de bénéficier de sa force de travail. Mais au moins, dans “la moitié des cas”, c’est à l’avantage du travailleur.
Alors qu’avec la logique “relativiste” de Marx, c’est toujours à l’avantage du capitaliste, puisque le salaire est minimisé en fonction du coût de la vie.) Bref…il poursuit:
“La force de travail se réalise par sa manifestation extérieure. Elle s’affirme et se constate par le travail, lequel de son côté nécessite une certaine dépense des muscles, des nerfs, du cerveau de l’homme, dépense qui doit être compensée. Plus l’usure est grande, plus grands sont les frais de réparation. Si le propriétaire de la force de travail a travaillé aujourd’hui, il doit pouvoir recommencer demain dans les mêmes conditions de vigueur et de santé. Il faut donc que la somme des moyens de subsistance suffise pour l’entretenir dans son état de vie normal.
Les besoins naturels, tels que nourriture, vêtements, chauffage, habitation, etc., diffèrent suivant le climat et autres particularités physiques d’un pays. D’un autre côté le nombre même de soi‑disant besoins naturels, aussi bien que le mode de les satisfaire, est un produit historique, et dépend ainsi, en grande partie, du degré de civilisation atteint. Les origines de la classe salariée dans chaque pays, le milieu historique où elle s’est formée, continuent longtemps à exercer la plus grande influence sur les habitudes, les exigences et par contrecoup les besoins qu’elle apporte dans la vie. La force de travail renferme donc, au point de vue de la valeur, un élément moral et historique ; ce qui la distingue des autres marchandises. Mais pour un pays et une époque donnés, la mesure nécessaire des moyens de subsistance est aussi donnée.“

– mais il faut aussi qu’ils puissent nourrir et élever leurs enfants pour faire perdurer cette force de travail.
Marx écrit dans Le Capital ⭎ livre 1 section 2 :
“Les propriétaires des forces de travail sont mortels. Pour qu’on en rencontre toujours sur le marché, ainsi que le réclame la transformation continuelle de l’argent en capital, il faut qu’ils s’éternisent, « comme s’éternise chaque individu vivant, par la génération» Les forces de travail, que l’usure et la mort viennent enlever au marché, doivent être constamment remplacées par un nombre au moins égal. La somme des moyens de subsistance nécessaires à la production de la force de travail comprend donc les moyens de subsistance des remplaçants, c’est‑à‑dire des enfants des travailleurs, pour que cette singulière race d’échangistes se perpétue sur le marché.” 🤣
On parle de “reproduction de la force de travail”
L’augmentation du taux d’exploitation est donc limitée par ces facteurs, et n’est “viable” que pendant un temps.
Marc mentionne d’autres éléments qui permettent de ralentir cette baisse des taux de profit:
– le commerce international va permettre de diminuer les prix des matières premières et de l’alimentation.
Or, si le prix des matières premières baisse, la valeur du capital fixe (F) diminue aussi, donc la composition organique du capital (C = F/V) diminue, ce qui fait augmenter les taux de profit :
Tp2 = Pl / (V + F2) > Tp1 = Pl / (V + F1) si F2 < F1 à toutes autres choses égales.

Et si le prix de l’alimentation baisse, les captalistes “pourront” verser des salaires plus faibles aux travailleurs, qui ont besoin de moins de revenus pour se nourrir. Ils pourront donc tirer profit d’une plus grande partie de la valeur créée par le travail (augmenter le taux d’exploitation en diminuant le salaire, puisque le “minimum vital” a diminué):

Mais ces facteurs ne peuvent fonctionner qu’à court terme : l’accumulation de capital se poursuit et nourrit la tendance de long terme.
– Les gains de productivité sont également un facteur cité par Marx qui freine un temps la dimiution tendancielle des taux de profit.
En effet, s’il faut moins de travail pour produire la même quantité de capital fixe, cela diminue la valeur de ce capital fixe, et donc de la composition organique du capital, ce qui augmente le taux de profit. Mais encore une fois, les gains de productivité sont possibles un temps.
Toutefois, pour Marx, ces contre-tendance peuvent atténuer un peu la baisse des taux de profits à court ou moyen terme, mais ne pourront pas l’entraver complètement. Les taux de profit finiront donc par baisser, et le capitalisme est voué à disparaître, sous les poids de ses propres contradictions.
Limitations et critiques
Aujourd’hui, la plupart des économistes, même les économistes marxistes, ne croient plus en cette loi.
Plusieurs critiques ont été formulées:
1) Si effectivement on accumule toujours plus de capital dans nos économies, on ne constate par pour autant une augmentation du rapport entre la valeur de ce capital, et la valeur des richesses produites. En d’autres termes, il ne semble pas y avoir de réelle modification de la composition organique du capital.

Tp = (Te / Te + 1) * (1 / (1 + C)) ~ TPl / (1+C)
La composition organique du capital augmente avec le temps (accumulation de capital, productivité)
Le taux de profit est censé diminuer avec le temps.
Cela s’explique par exemple par le fait qu’il y a 30 ans, il y avait X ordinateurs dans l’entreprise, coûtaient 10 fois plus cher qu’aujourd’hui, et aujourd’hui il y en a 10*X qui coûtent 10 fois moins cher :

Michael Heinrich ⭎ affirme ici ⭎ qu’en plus on ne peut pas le démontrer à partir des principes posés par Marx de façon rigoureuse:
“Afin de déduire avec certitude la baisse tendancielle des taux de profits comme une tendance générale, l’argument de Marx exige la présomption que le taux de plus-value croît plus vite que le rapport capital/valeur, ce qui ne peut pas être démontré mathématiquement à partir des concepts avec lesquels Marx travaille.” (à vérifier)
2) Une augmentation du taux d’exploitation ne s’accompagne pas forcément d’un diminution du niveau de vie des travailleurs.

En reprenant l’exemple de la chasse au castor, si le gain de compétitivité permet de chasser deux castors plutôt qu’un seul en 2h :
– si le taux d’exploitation reste le même, le salaire augmente (il passe d’un demi-castor à un castor dans le cas d’un taux d’exploitation de 100%)
– si le taux d’exploitation augmente de façon à ce que la patron prélève 3/4 de la richesse produite, le salaire reste le même (il est toujours d’un demi-castor)


Les détracteurs de Marx / climato-dénialistes de type III diront qu’il vaut mieux générer 10 000€ de richesse / consommer X Joules d’énergie / émettre Y tonnes de GES et se faire prélever 75% de la richesse produite, ce qui donne un salaire de 2500€, que générer 1000€ de richesse / consommer X/10 Joules d’énergie / émettres Y/10 tonnes de GES et se faire prélever 50% de la richesse produite, ce qui donne un salaire de 500€.

3) Le principe selon lequel le capital ne peut pas être source de la plus-value est “largement discutable”.
“Prétendre, comme le fait Marx, que le capital ne peut pas être la source de la plus-value est une position difficilement tenable, qui conduit notamment au problème de la transformation, évoqué plus haut. Elle lui permet toutefois de faire du travail seul l’origine de toute la valeur créée, ce qui est cohérent avec la volonté de Marx de faire de la théorie de la valeur une théorie de l’exploitation. Il faut pour cela que l’ensemble de la plus-value réalisée par les capitalistes soit créée par les travailleurs.” (Des économistes et des hommes)
4) La question des débouchés (de l’écoulement des marchandises) est absente de l’analyse de Marx.
“Un des grands problèmes que rencontre la classe des capitalistes est de trouver des débouchés pour sa production. Or, cette question des débouchés est quasi-absente ce cette analyse de Marx (elle l’est en réalité surtout à la fin, au moment de la crise du capitalisme, liée au fait que l’épargne des capitalistes ne trouve plus à s’investir). Auparavant, tout se passe comme si les capitalistes étaient certains de pouvoir écouler sans difficulté la production de leurs employés.
Marx sera très critique envers la loi de Say ⭎ (selon laquelle l’offre crée sa propre demande), mais il n’arrivera jamais réellement à la réfuter et expliquer l’existence d’une surproduction généralisée. Il faudra attendre les travaux de Keynes pour que ce point se retrouve au centre des débats théoriques en économie.” (Des économistes et des hommes)
(Largement inspiré de cette vidéo ⭎ ⭎ de Des économistes et des hommes)
Théorie néoclassique de la valeur
Walras, Jevons, Menger montrent que la valeur d’échange (donc le prix) est liée à la valeur d’usage (donc l’utilité), et introduisent la notion d’utilité marginale, c’est la révolution marginale.
L’eau peut illustrer le concept d’utilité marginale (marginale = dérivée de l’utilité = valeur d’une unité de bien supplémentaire), dans la mesure où le premier verre a plus d’utilité que le second, et le second que le troisième, et ainsi de suite : la fonction utilité
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