SOMMET C : LE PIB

Le PIB est l’indicateur principal de la croissance, qui est notre modèle de développement actuel. Il était historiquement pertinent dans le contexte de reconstruction d’après-guerre dans lequel il est né.

Le PIB (produit intérieur brut) peut être vu sous différents angles suivant le contexte dans lequel on l’utilise, et peut donc se définir de plusieurs façons techniques, mais qui relfètent un aspect de sa nature : il mesure des flux, et est aveugle aux stocks.

- Sous l’angle de la production
Le PIB est égal à la somme
– des valeurs ajoutées ⭎ des agents économiques résidents (VA = production – consommation intermédiaire), calculée aux prix du marché,
– à laquelle on ajoute la part de la valeur ajoutée récupérée par l’État (taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et droits de douane (DD))
– et de laquelle on soustrait les subventions sur les produits (Sub) :
PIB = VA + TVA + DD – Sub
PIB = VA + Impôts nets des subventions
C’est l’angle utilisé en pratique : on additionne simplement toutes les valeurs ajoutées issues des comptes de résultats fournis par les entreprises, et les administrations publiques. - Sous l’angle des revenus
Le PIB est égal à la somme des revenus bruts des secteurs institutionnels :
– rémunération des salariés (RS),
– excédent brut d’exploitation et revenus mixtes (EBE).
– impôts sur la production et les importations (Imp) moins les subventions (Sub)
PIB = RS + EBE + Imp – Sub
PIB = VA + Impôts nets des subventions - Sous l’angle des dépenses
Le PIB est égal à la somme des emplois finaux intérieurs de biens et de services, c’est-à-dire :
– la consommation finale ⭎ effective (CF), composée de la consommation (C) et des dépenses publiques courantes (G) : CF = C + G
– l’investissement (formation brute de capital fixe ⭎ (FBCF)) (Inv)
– et les variations de stocks (VS).
Cette définition se déduit de l’égalité comptable entre les ressources de l’économie (PIB) et les emplois qui sont faits de ces ressources:
PIB = CF + Inv + VS
Dans une économie ouverte les importations (notées M) s’ajoutent aux ressources, les exportations (notées X) aux emplois, si bien que la relation ci-dessus devient :
PIB + M = CF + Inv + VS + X
Ou, en négligeant les variations de stock :
PIB = CF + Inv + (X – M)
Cet indicateur a été “inventé” à l’après-guerre, car il était pertinent pour mesurer l’état d’avancement de la reconstruction (des stocks d’actifs : bâtiments, hôpitaux, écoles, etc.). Lorsqu’il n’y a plus de stock, mesurer le “flux” de production permet d’apprécier l’évolution de la reconstitution du stock. Mais nous avons reconstitué le stock depuis lors.
C’est un indicateur qui mesure la production. Mais pour la mesurer, il faut qu’elle soit monétisée. Le PIB ne mesure donc que la production dans la sphère marchande, composée de la production marchande et non-marchande (services). Il ne compte que ce qu’il sait compter.
Comme le dit Timothée Parrique dans “Economie de la décroissance”:
“Ce qui est compté ne compte pas forcément et ce qui compte n’est pas forcément compté“
Il voit d’ailleurs la monétisation comme une valeur intermédiaire à la production, une valeur aveugle aux limites planétaires. Avec son économie anthropologique, il propose de “compter” la production en terme d’énergie mobilisée, de ressources mobilisées, et d’heures de travail mobilisées.
Et ne pas bien compter est loin d’être son seul défaut!
L’idéologie de la croissance du PIB peut sans caricaturer être vue comme une forme de folie. Elle ne profite qu’à ses défenseurs, encore plus dans un contexte capitaliste.
Extrait de “Science & savoirs, hors-série, “Les bases de l’économie” :
“Il est aujourd’hui admis par de nombreux économistes que le modèle de croissance qui a porté l’ensemble de spays développés au cours des dernières décénnies n’est plus viable, pour au moins deux raisons:
-Premièrement, l’augmentation de la production et des échanges internationaux participe largement à l’épuisement des ressources, à la dégradation de l’environnement, et donc à la destruction de la planète.
-Deuxièmement, la croissance économique (du PIB) a tendance à profiter uniquement à une petite partie de la population. Elle creuse de plus en plus les inégalités. En France, le taux de pauvreté est toujours le même depuis 25 ans, alors que sur la même période le PIB a progressé de 30%!“
Dans le même temps, le senior economist de la KBC Van Gompel fait percoler l’idéologie, qui remontera comme “coulant de source” vers les ministères publics (voir image ci-dessous, extraite de Politique économique en Belgique (1960-2021) ⭎) :



L’économie, c’est l’organisation de la satisfaction de nos besoins, qui est composée d’une sphère marchande (où les biens et services s’échangent contre de l’argent) et d’une sphère non-marchande (où il s’échangent contre tout, sauf de l’argent)

Faire croître le PIB, c’est faire croître la (production de la) sphère marchande. Si nos besoins sont saturés, alors il faudra créer de nouveaux besoins afin de continuer à faire croître la production. (et générer des inégalités). Ca peut mener à des logiques absurdes!
Cela passe aussi par faire passer des versants entiers de l’économie non-marchande dans l’économie marchande. Cela ne change rien à la satisfaction de nos beosins, ils sont toujours autant satisfaits, mais en échange, on donne de la marge au Capital, et on paie pour ce qu’avant on ne payait pas. Tout bénef?
C’est par exemple faire passer des services publics dans le secteur privé.
C’est tout monétiser, c’est rendre “la vie” payante.
Si des pompiers sont un service public. Et qu’on décide de privatiser ce service. La seule chose qui changera, c’est qu’on devra payer plus cher, car on devra payer une marge au “capital” (creuser les inégalités). Dans les 2 cas, l’incendie sera éteint.

Si le pompage, traitement et distribution d’eau est un service public. Et qu’on décide de privatiser ce service. La seule chose qui changera, c’est qu’on devra payer plus cher, car on devra payer une marge au “capital” (creuser les inégalités). Dans les 2 cas, on boit de l’eau.
D’ailleurs, si on n’achetait pas autant de bouteilles en plastiques remplies avec de l’eau de NOS sources et NOS nappes phréatiques à des compagnies privées, et qu’on consommait plutôt l’eau du service public, sans doute serait-il mieux financé et donc plus performant?
conférence avec Hervé Kemp et Jean-Michel Dijan
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