Quotas CO2
Alors finalement? Ce “pass carbone” “MyCarbon”
1. Fake ou pas?

lien ⭎ vers l’article de TF1
lien ⭎ vers l’article du WEF
2. Bonne idée ou pas?
Le poids (empreinte) carbone étant proportionnel aux revenus, et notre budget carbone national étant limité, il est normal qu’il soit réparti de façon équitable (= égale dans ce cas-ci) parmi nous tous.
La justice sociale découle automatiquement de la justice climatique!
La fin des privilèges de classe, conséquence de la lutte contre le dérèglement climatique?
On a l’identité de Kaya suivante:
CO2 = CO2
CO2/hab = CO2/PIB * PIB/hab
poids carbone = intensité de l’économie * pouvoir d’achat.
poids carbone ∝ pouvoir d’achat (tout ce qu’on achète contient de l’énergie grise)
Ce qui suit discute autour de l’idée de quotas CO2 individuels.
Cet article ⭎ de La Tribune de 2020 en parle :
A y regarder de plus près, il semble se dessiner des cercles vertueux, une dynamique auto-entretenue, une garantie d’une forme de justice sociale à plusieurs échelles…au prix d’un petit effort d’organisation, d’ordre bureaucratique.
Ca peut sembler paradoxal, mais j’essaie d’être bref, et c’est donc au prix de raccourcis/approximations.
Attention : dans ce post, le terme “empreinte carbone” réfère à la notion de “poids carbone” (en kgCO2eq) PAS à une quantité de surface en hectares, qu’on appelle “empreinte environnementale” (cfr cet article ⭎ de Nature)
Voilà le schéma (cliquer pour dérouler) :
1) Pourquoi serait-ce pertinent?
(post original ⭎ sur Transition 2030)
Si on considère la réduction des GES à l’échelle globale comme l’impératif principal à optimiser sous les contraintes de l’urgence et de la justice sociale, il y a une voie en or: Instantanément, on peut ~doubler notre perspective, et donc notre contribution à la lutte contre le dérèglement climatique.
Et en plus, c’est propre à la Belgique! (dans ces proportions-là)
Comment?
En retraçant la limite à laquelle on définit les émissions de CO2 desquelles on est responsables.
En ayant bien en tête ce raisonnement qui montre les deux façons de comptabiliser le total des émissions anthropiques.
Quel est le sens de délocaliser son système productif en-dehors de ses frontières puis de dire “regardez, on émet moins de CO2 depuis notre territoire” ?
On estime qu’environ 1/3 des émissions de CO2 chinoises sont le fait de la production de biens destinés à l’exportation…et les moissoneuses-batteuses nord-américaines qui récoltent le maïs destiné à nourrir votre futur morceau de viande sud-américain? Qui en est responsable de leurs émissions? Et la production d’électricité pour reffroidir leurs datacenters?
L’offreur ou le demandeur?
Se fixer des objectifs climatiques (nos NDC à l’ONU) en terme de poids carbone plutôt que d’émissions domestiques (qui sont incluses dans le poids carbone bien sûr) :
– c’est plus juste, dans le sens où il serait plus juste que le responsable d’émisisons des GES soit la personne pour laquelle toute cette énergie et ces moyens ont étés déployés à son seul profit, en tant qu’utilisateur final.
– c’est plus juste, dans le sens où les pays les plus pollueurs, en limitant leur budget carbone explicitement (alors qu’actuellement, on se fiche de l’intégrale sous la courbe des émisisons), permettent, en convergeant “vers le bas” vers la “ligne de eEᵢ=0”, aux autres pays “sous la ligne” de bénéficier de ce budget pour eux, converger “vers le haut” vers la ligne de eEᵢ=0.
Bref, ça semble plus juste à bien des égards…mais surtout…est-ce que ça peut être efficace?
2) Quelles seraient les conséquences concrètement?
Pour partir sur une base : prenons celle de la plate-forme wallone pour le GIEC.
On raisonne donc à partir de là, plutôt que des émissions domestiques. Elles sont incluses dans notre empreinte carbone: On introduit donc des quotas individuels, dégressifs de CO2eq, alignés sur les Accords de Paris (sur les BUDGETS carbone : ~750 Gtones de CO2eq jusqu’en 2100 pour l’humanité pour rester sous les 1,5°c)
Cela implique un traçage CO2eq des produits de consommation et des services. Et on devrait donc chacun jongler avec deux “boules” :
– un budget en € (notre portefeuille classique) et
– un budget en CO2eq annuel…(notre portefeuille carbone)
Devrait-on organiser un marché des quotas?
Car justement, étant donné que l’empreinte carbone est fortement corrélée aux revenus, le soucis de justice sociale tend plutôt à cloisonner les circuits € de notre portefeuille classique des circuits CO2eq de notre nouveau portefeuille carbone : donc plutôt une économie parallèle.
Est-ce que cette mécanique ne pourrait-elle garantir aussi une forme de justice sociale, comme en parle l’article? Etant donné que “les 10% les plus riches sont responsables (par leur empreinte carbone) de 90% des émissions” et que c’est fractal (~2/3 des belges font partie des 10% les plus riches de la planète), et bien mécaniquement :
– les plus gros pollueurs (les plus riches) sont ceux qui doivent faire le + d’effort pour s’aligner sur les quotas (chacun est égal devant ses responsabilités)
– les plus pauvres sont ceux dont le niveau de vie est déjà en-dessous des quotas, donc il bénéficieront de revalorisations de quotas sans rien faire…
—EDIT : En fait, comme on observe que le poids carbone est proportionnel aux revenus de façon fractale (au niveau du PIB entre pays, et au niveau des revenus individuels au sein d’un même pays), on pourrait même modéliser le poids carbone individuel pour une personne p par eₚ = e(k(p)) = eₘ * k, où eₘ=eᵢ est le poids carbone individuel moyen (les 16tCO2eq/an/hab pour la belgique), et k(p) est un facteur proportionnel aux revenus de la personne p, normalisé, qui vaut 1 pour le revenu moyen.
De sorte que ( Σₚ eₚ )ᵢ = eᵢ * Pᵢ = Eᵢ pour le pays i.
—fin de l’EDIT
On peut aussi imaginer décliner plusieurs “saveurs” de quotas : quotas chauffage, transport, reste, etc…(éventuellement propres à chacun en fonction de sa situation géographique, l’accès aux transports en commun, etc. :
l’Etat a un rôle à jouer) dans le seul but d’assurer une justice sociale…et d’arriver dans ce cas de figure vertueux.
On peut envisager d’indexer les quotas sur la part de responsabilité de l’Etat : mix énergétique, offre de transport, empreinte carbone de ce qui relève du public, …
Que cet index (devant lui aussi s’aligner sur les Accord de Paris) puisse être évalué par une instance indépendante en mesure de sanctionner l’Etat pour inaction suffisante. Par exemple, pour remplacer sa chaudière à gaz par un système électrique afin de pouvoir “soulager son quota” dans le reste, deux façons :
– en économisant de l’argent
– en économisant du CO2 (en faisant une année avec moins de viande, ou sans voyage en avion, par exemple)
==> subsides pour les quotas non-utilisés l’année suivante.
Si les producteurs (locaux favorisés de facto puisque faisant l’économie des mix énergétiques plus polluants de l’étranger, ainsi que du transport) font une course aux subsides en se décarbonnant un maximum, pouvant ainsi offrir le même produit/service au même prix, mais nous décomptant moins dans notre budget carbone que les produits concurrents?
Ca pousse aussi à la réparer/faire durer ses objets plutôt qu’à les remplacer, à économiser l’énergie : ce n’est plus qu’une question de budget financier mais de budget CO2eq aussi.
“cut the lines
starve the piggies
cut the lines
drop the G-H-G’s”
Ca paraît bien beau, mais est-ce réaliste?
3) Comment est-ce que ça pourrait être mis en place?
C’est assez simple à mettre en place : on inventorise (avec les bases de données style IMPACTS de l’Ademe, ou d’autres bases de données utilisées dans les études de cycles de vie), on étiquette tout, pendant que d’autres mettent en place une politique de quotas juste et comment l’accompagner…
Bien sûr, ça nécessite des décideurs qui sont au courant du problème, donc qui ont au moins vu une fois une conférence de Jean-Marc Jancovici par exemple.
(Qui comprennent le couplage intrinsèque entre émissions de CO2 globales et PIB local) Que pensez-vous de cette stratégie? A-t-elle des effets pervers socio-économiques importants qui n’auraient pas été pris en compte?
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🔱Structure du triangle de Kaya