Les marchés financiers
Les marchés financiers véhiculent une image sulfureuse, alimentée par la crise de 2008, l’affaire Kerviel, les reportages sur les paradis fiscaux…Comment fonctionnent-ils? Sont-ils toujours au service de l’économie? Voici quelques éléments de réponse.

Introduction
Au cours des quatre dernières décennies, les marchés financiers ont connu d’importantes transformations.
L’invention de la “titrisation ⭎“, à la fin des années 70, puis l’émergence des “produits dérivés ⭎” ont participé à la complexification des transactions, qui en parallèle se sont étendues à l’ensemble du globe.
Est-ce un hasard, alors, que les crises se soient multipliées? Krach de 1987 ⭎, junk bonds ⭎, bulle spéculative japonaise ⭎ à la fin des années 80, éclatement de la bulle Internet ⭎ au début des années 2000…Un point culminant a été atteint en 2008 lorsque la crise des subprimes ⭎ a provoqué une récession mondiale, elle-même en partie responsable de la crise grecque.
Cet événement majeur dans l’histoire des marchés financiers a ravivé le spectre de la Grande Dépression ⭎ de 1929. Les médias se sont fait le relais d’un monde clos, déconnecté de l’économie réelle, où règnent des “traders fous” uniquement mus par la recherche du profit immédiat.
En 2018, une enquête BVA pour la Fédération bancaire française (FBF) a révélé que le taux de confiance des français envers les banques (66%) avait enfin retrouvé son niveau d’avant la crise.
Ce que les interrogés ignorent peut-être, c’est que faire confiance aux banques revient à faire confiance aux marchés. En effet, si en 1980, les activités de marché représentaient seulement 5% du bilan des banques, cette proportion s’est fortement accrue au fil des années, rendant ainsi les établissements de crédit vulnérables aux éventuels dysfonctionnements.
Le fonctionnement classique des marchés financiers
Ce que nous appelons “marchés financiers ⭎” est en fait l’une des composantes d’un marché plus général, celui des “capitaux”, sur lequel s’échangent des valeurs mobilières ⭎, c’est-à-dire des actions et des obligations.
Une action ⭎ représente un titre de propriété qui correspond à une partie du capital d’une société.
Une obligation ⭎ désigne un titre de créance à long terme donnant lieu au règlement d’un intérêt, dont la valeur est connue au moment de l’émission. Ce titre de créance correspond à une fraction de la dette d’un État (dette souveraine) ou d’une société privée.
On a coutume de dire que les obligations constituent un placement moins risqué que les actions, pour deux raisons.
Tout d’abord, un État ne peut pas “faire faillite” à proprement parler. On dira plutôt qu’il “fait défaut” à sa dette. Ce fut le cas de la Russie en 1918 : les bolcheviks, après avoir renversé le tsar, ont refusé de régler la dette et de nombreux français qui détenaient des “emprunts russes” ont perdu de l’argent.
Ensuite, dans le cas d’une faillite privée, les créanciers (donc les détenteurs d’obligations) sont toujours dédommagés avant les actionnaires.
Actions et obligations sont indispensables à la bonne marche de l’économie, car elles permettent aux entreprises de financer leurs investissements. Toutefois, il faut savoir que le rendement d’une action demeure incertain.
Les “dividendes ⭎” versés aux actionnaires dépendent des résultats de l’entreprise. À l’inverse, le rendement d’une obligation est fixe. Il correspond au taux d’intérêt convenu lors de l’achat du titre. L’obligation est docn plus “sûre” que l’action, mais elle est aussi potentiellement moins rémunératrice.
Depuis les années 80, le financement par le biais des marchés s’est considérablement développé, notamment en raison de l’internationalisation de la finance. Ce développement s’est opéré au détriment du crédit bancaire traditionnel. En effet, il est plus facile pour une entreprise d’obtenir de l’argent auprès de nombreux investisseurs plutôt qu’auprès d’une seul établissement de crédit.
Toutefois, les marchés financiers demeurent le plus souvent inaccessibles aux petites et moyennes entreprises, qui constituent pourtant l’essentiel de notre tissu économique.
Plusieurs types d’acteurs se rencontrent sur les marchés financiers.
– En premier lieu, citons les “émetteurs“, qui regroupent à la fois des entreprises, des États et des institutions financières telles que les banques d’investissement qui opèrent pour le compte des deux premiers. Ces “émetteurs” proposent des titres aux “investisseurs”, qui peuvent être des personnes morales ou physiques.
– L’échange de ces titres est rendu possibles par les “intermédiaires“, c’est-à-dire les acteurs habilités à traiter des ordres de Bourse, comme les banques, les courtiers, mais aussi les OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières, qui regroupent SICAV ⭎ et FCP ⭎), ainsi que les fameux hedge funds ⭎.
– Enfin, les marchés financiers ne sauraient fonctionner convenablement sans “régulateurs“. En France, c’est l’Autorité des marchés financiers (AMF) qui est chargée de veiller au bon fonctionnement des échanges.
“On peut résumer le monde entier sous la forme d’un graphique montrant des flux de capitaux.” Paul Tudor Jones


Les dysfonctionnements des marchés financiers
Si les marchés financiers souffrent aujourd’hui d’une mauvaise image, ce n’est pas sans raison.
En 2007, la crise des subprimes a inauguré une crise bancaire et financière mondiale.
Les subprimes désignent ces prêts hypothécaires à taux variables que les banques proposaient aux ménages modestes. L’octroi de ces prêts était soumis à une condition : en cas de non-paiement du crédit, la banque devenait propriétaire de l’habitation.
Une fois conclus, les subprimes étaient transformés en titres (ou “titrisés”) pour être vendus sur les marchés financiers. Ainsi, les banques récupéraient de l’argent instantanément, tout en se déchargeant du risque lié au crédit.
Mais les rehaussements brutaux des taux d’intérêt opérés par la banque centrale américaine au cours des années 2000 ont conduit de nombreux ménages à ne plus pouvoir rembourser leur prêt et donc à hypothéquer leur bien. De nombreuses habitations sont subitement arrivées sur le marché immobilier. L’offre devenant largement supérieure à la demande, les prix se sont effondrés.
La baisse des prix de l’immobilier a provoqué une chute du cours des titres, si bien que les investisseurs ont cherché à s’en débarrasser, encourageant ainsi une diminution encore plus drastique de leur valeur!
Les conséquences sont graves : Lehman Brothers ⭎, l’une des principales banques américaines, fait faillite. S’ensuit alors une crise de confiance mondiale. Les banques refusent de se prêter de l’argent entre elles, les investisseurs se détournent des marchés financiers, les agences de notation révisent leurs notes à la baisse. Les États et les banques centrales se voient alors contraints d’intervenir pour sauver les banques privées afin d’empêcher l’effondrement du système financier.

Outre la “titrisation”, créée à la fin des années 70, les “produits dérivés” sont également pointés du doigt pour leurs caractéristiques délétères.
Les produits dérivés sont des instruments financiers qui permettent de se positionner pour acheter ou pour vendre une marchandise dont le cours évolué, à une échéance fixée à l’avance.
Par exemple, ils permettent d’acheter au prix d’aujourd’hui des céréales qui seront disponibles dans six mois à un prix différent. Pour certains investisseurs, ces produits constituent un outil de prévision et de gestion indispensable (une entreprise agroalimentaire sait à quel prix elle obtiendra ses céréales dans six mois).

Lien ⭎ vers l’article
Toutefois, les produits dérivés sont aussi propices à la spéculation, notamment lorsqu’ils sont “optionnels ⭎” (swaptions ⭎, warrants ⭎, turbo ⭎, …). Moyennant le versement d’une “prime”, l’investisseur s’octroie le droit d’acheter ou de vendre en fonction du cours de l’”actif sous-jacent”, c’est-à-dire du cours de la marchandise.
Le problème étant que les cours des marchandises évoluent aussi en fonction du nombre de personnes qui s’y intéressent et de la quantité d’argent qu’elles sont prêtes à dépenser pour les obtenir!
La finance profite-t-elle à l’économie?
Si la crise de 2008 est la plus importante depuis 1929, les marchés financiers sont régulièrement secous depuis le début des années 80.
Cette situation résulte de la complexité croissante des produits financiers, mais aussi de l’apparition de nouveaux acteurs dont certains, comme les hedge funds ⭎ des paradis fiscaux, échappent à toute régulation.

Par ailleurs, les marchés financiers assurent de moins en moins leur rôle qui consiste à collecter l’épargne de M. et Mme Tout-le-monde. Les entreprises émettent moins d’actions et traitent davantage “de gré à gré” -c’est-à-dire en direct- avec les fonds spéculatifs ⭎ notamment.
Or ces organismes s’intéressent à la rapidité avec laquelle le profit sera obtenu. On peut donc considérer que les marchés financiers encouragent de plus en plus une gestion à court terme de l’économie.

Enfin, l’Europe est confrontée à une situation de concentration du secteur bancaire. Les absorptions et fusions successives ont donné naissance à de véritables géants. À titre d’exemple, BNP Paribas ⭎ représente aujourd’hui presque l’équivalent du PIB français. Les banques ont acquis une dimension tellement importante qu’en cas de problème, les États -et à travers eux, les contribuables- sont obligés de leur venir en aide.
Pourquoi n’ouvre-t-on pas les marchés financiers aux PME?
ChatGPT :
Ouvrir les marchés financiers aux PME (petites et moyennes entreprises) peut sembler une excellente idée pour stimuler leur croissance et leur permettre d’accéder à des capitaux. Cependant, plusieurs raisons expliquent pourquoi cela reste un défi majeur, et pourquoi les marchés financiers traditionnels ne sont pas encore pleinement adaptés à ces entreprises.
- Les coûts d’entrée élevés
- Le risque perçu par les investisseurs
- La faible liquidité
- Manque de visibilité et de crédibilité
- Complexité des régulations
- Alternatives déjà en place
(voir le lien ci-dessous pour lire les détails de chaque point)
Malgré ces défis, des initiatives existent pour faciliter l’accès des PME aux marchés financiers
- Marchés secondaires spécialisés : Certains marchés boursiers, comme Euronext Growth ou AIM (Alternative Investment Market) au Royaume-Uni, sont spécifiquement conçus pour les PME avec des règles plus souples.
- Obligations PME : Des programmes permettent aux PME d’émettre des obligations, offrant une alternative au financement par actions.
- Digitalisation et crowdfunding : Les plateformes de financement participatif deviennent des outils puissants pour lever des fonds, avec des régulations plus légères.
L’ouverture des marchés financiers aux PME est un sujet complexe, qui nécessite un équilibre entre l’accès au capital, la protection des investisseurs, et les capacités des PME à répondre aux exigences des marchés.
Stimuler leur croissance ne doit pas être l’objectif, étant donné la nécéssite de décroître l’utilisation d’énergie, qui est couplée aux émissions de GES.
Qu’est-ce qui change dans le raisonnement précédent si on remplace “stimuler leur croissance” par “décarbonner leurs modes de production”?
Si l’objectif devient de décarboner les modes de production des PME plutôt que de stimuler leur croissance, cela modifie profondément le raisonnement et les priorités associées à l’ouverture des marchés financiers aux PME. Voici les principaux changements :
- Un objectif centré sur la transition écologique
L’accès aux marchés financiers ne viserait plus à fournir un capital pour croître, mais à financer des investissements spécifiques pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) et adopter des technologies plus sobres en carbone.
Exemples : Adopter des énergies renouvelables, rénover les bâtiments pour améliorer l’efficacité énergétique, ou transformer les procédés industriels pour réduire les émissions.
- Une perception différente du risque
Les investisseurs pourraient être plus enclins à soutenir des PME ayant un plan clair de décarbonation, car le risque lié aux émissions de GES devient de plus en plus visible, y compris sur le plan financier (taxe carbone, pression réglementaire, réputation).
Les PME avec des projets alignés sur la transition écologique pourraient être vues comme des investissements stratégiques dans un contexte de lutte contre le changement climatique. - Adaptation des marchés financiers pour soutenir la décarbonation
Pour que les marchés financiers soient ouverts aux PME en vue de financer la décarbonation, ils devraient être adaptés pour répondre à ce nouvel objectif :
– Critères environnementaux clairs : Les entreprises devraient démontrer que les fonds levés seront utilisés pour des investissements à faible empreinte carbone.
– Produits financiers verts : Créer ou renforcer des mécanismes comme les obligations vertes (green bonds) spécialement destinées aux PME.
– Incitations pour les investisseurs : Réduire les taxes sur les investissements verts ou offrir des garanties pour les projets de décarbonation. - Liquidité moins critique
La question de la liquidité (acheter ou vendre rapidement des titres) devient moins prioritaire, car l’objectif est de financer des projets spécifiques de transition. Les investisseurs pourraient accepter des horizons d’investissement plus longs, s’ils sont alignés sur les objectifs climatiques. - Un rôle accru des politiques publiques
Pour soutenir ce modèle, l’État et les institutions publiques pourraient jouer un rôle clé :
– Garanties publiques : Réduire les risques pour les investisseurs en cofinançant ou en garantissant les investissements dédiés à la décarbonation.
– Régulation spécifique : Exiger des marchés financiers qu’ils intègrent des critères climatiques pour faciliter l’accès des PME à ces financements. - Une meilleure adéquation aux alternatives existantes
Les mécanismes alternatifs au financement traditionnel (comme le financement participatif ou les subventions publiques) pourraient être combinés aux marchés financiers pour accélérer la transition des PME :
– Crowdfunding climatique : Mobiliser des particuliers et des institutions pour financer des projets de décarbonation.
– Fonds souverains climatiques : Investir directement dans des PME locales pour des projets verts.
En résumé
Avec un objectif de décarbonation, l’ouverture des marchés financiers aux PME pourrait s’articuler autour de critères environnementaux stricts et de mécanismes financiers adaptés pour maximiser l’impact climatique. Cela changerait la perception des PME sur les marchés : au lieu de les considérer comme des investissements risqués, elles seraient vues comme des acteurs clés de la transition écologique, méritant un soutien renforcé.
(lien ⭎ vers la page chatGPT)
Largement retranscrit du hors-série de Science & savoirs “Les bases de l’économie”
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